à Tiaret (Algérie), le 21 septembre 2012, trois amis, l’un musulman, l’autre juif, le troisième chrétien.


L’amitié

L’actualité internationale est polarisée sur les manifestations violentes dans certains pays musulmans suite au (très mauvais) film « l’innocence des musulmans » et aux caricatures de Charlie-Hebdo. Nous venons d’ailleurs de recevoir un message du consulat de France donnant aux ressortissants français en Algérie des « consignes de vigilance »...
Ce soir nous recevons des pieds-noirs anciens de Tiaret venus en « pèlerinage » sur leur terre natale. La petite communauté chrétienne de Tiaret, constituée d’étudiants subsahariens, a préparé dans le jardin de la maison un petit apéritif dînatoire. Et voici nos invités. Ils ne sont que deux pieds-noirs à avoir pu répondre à notre appel. Mais sur leur chemin ils ont rencontré un Algérien vieux camarade des années d’école et l’ont amené avec eux. Les voilà bras dessus, bras dessous, trois hommes de plus de 70 ans, trois copains d’enfance heureux comme larrons en foire de se retrouver après plus de cinquante ans, de se raconter leurs vieilles histoires d’écoliers. Et ils sont l’un musulman, l’autre juif et le troisième chrétien. Tous les trois réunis par une amitié que les ans n’ont pas altérée. Et c’est un vrai bonheur de les voir ainsi, vieux bonhommes, dans la joie de gamins insouciants.
vue de Tiaret_ L’ami musulman raconte sobrement et avec fierté comment après l’école primaire de Tiaret, il s’est retrouvé à la fin des années 50 au lycée Saint-Louis d’Oran où il a suivi tout le catéchisme. Il s’y connaît en religion catholique !
L’ami juif, en verve, raconte comment se pratique le judaïsme, à des étudiants qui pour la plupart rencontrent un juif pour la première fois et « pour de vrai » !
Ces trois hommes témoignent chacun de la belle et vieille amitié qui les lie dans une humanité qui dépasse les différences de confessions religieuses. Le rayonnement de cette amitié illumine le visage des jeunes étudiants qui les écoutent...
Et ces trois-là s’intéressent vraiment à leur tour à ces jeunes étudiants étrangers en Algérie, se demandant comment ils peuvent les aider.
Nous vivons ce moment de grâce et d’amitié entre un juif, un chrétien et un musulman, à l’heure où la haine dresse des hommes les uns contre les autres au nom de Dieu... Il me semble que Dieu ce soir-là était quelque part caché dans notre jardin et je crois l’avoir vu sourire.

F. Hubert Le Bouquin