Les frères Antonio, Marie-Nicolas, Sylvain et Yves ont fait leur profession solennelle dans l’Ordre des frères mineurs Capucins le samedi 1er juillet 2023, à l’église Saint-Jacques du Haut-Pas à Paris. Retrouvez ci-dessous l’homélie prononcée par le Frère Eric Bidot, Ministre provincial des Capucins de France, à cette occasion.
« Quand j’ai choisi de m’appeler François, je savais que c’était faire référence à un saint très populaire, mais si peu compris. De fait, François, c’est l’homme de la paix, l’homme de la pauvreté et l’homme qui aime et célèbre la création ; mais quelle est la racine et la source de tout cela ? Jésus Christ. C’est un amoureux de Jésus Christ, qui pour le suivre n’a pas peur de faire le ridicule mais va de l’avant. La source de toute son expérience, c’est la foi¹. »
S’adressant aux membres de la famille franciscaine à l’aube de plusieurs anniversaires liés à la vie de saint François d’Assise, le pape François nous donne une clé pour comprendre votre engagement d’aujourd’hui, frères Antonio, Marie-Nicolas, Sylvain et Yves. Evidement, à 26 ans, 31 ans, 43 ans ou 55 ans, de familles aux histoires différentes, d’études et d’activités variées, vous êtes très différents. Vous avez vécu à Nantes, en Alsace, en Savoie, à Madagascar et en d’autres lieux. Vous avez été éducateur, étudiant, ingénieur, financier.
« Saisis par la main amoureuse de Jésus-Christ »
Vous avez fait des rencontres décisives, fréquenté des figures spirituelles d’hier et d’aujourd’hui, et, agissante durant ces années et expliquant votre présence parmi nous, il y a la foi en la présence de Dieu qui, petit-à-petit, a clairement donné forme à votre volonté de mettre au centre de votre existence la recherche de Jésus- Christ, pauvre et crucifié, toujours vivant. Vous avez pris au sérieux cette affirmation centrale, pour saint Paul, comme pour nous : « Je poursuis ma course pour tâcher de saisir, puisque j’ai moi-même été saisi par le Christ Jésus. » (Ph 3, 12).
Saisi par la main amoureuse de Jésus-Christ, vous avez cherché l’environnement où poursuivre votre course, avec des frères et en frère. Nous sommes vos frères, avec nos qualités et nos limites.
Nous sommes vos frères, avec nos qualités et nos limites. Nous sommes, comme vous, à la fois ordinaires et uniques, fragiles et traversés par la grâce que Dieu donne au jour le jour. Nous sommes frères en Jésus-Christ qui nous réunit en une seule et même famille (cf Constitutions 5, 4), fils du Père des Miséricordes, dans le désir de l’Esprit du Seigneur et de sa sainte opération.
Etre des frères mineurs
D’abord « pénitents venus d’Assise », François a voulu que nous nous appelions « frères mineurs » (1 Rg 6, 3), un nom qui rappelle les gestes et les paroles de Jésus : « que le plus grand se fasse le plus petit », « non pas être servi, mais servir » ou encore « qu’ils se lavent les pieds l’un à l’autre » écrivait François dans sa Première Règle (5, 12 ; 4, 6 ; 6, 4), citant des versets d’Evangile.
« Revêtir ce nom de « frère mineur », c’est opérer un changement de centre de gravité, de soi au Fils Bien-Aimé, de Narcisse à Jésus. »
Nous avons là un écho de l’attitude d’Abraham à l’égard de ses trois hôtes, se faisant leur serviteur (Gn 18, 1-15). La parole du centurion : « Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri » (Mt 8, 5-17) est, elle aussi, un rappel de cette même attitude de minorité qui porte des fruits authentiques dans l’Eglise et la société.
Revêtir ce nom de « frère mineur », c’est opérer un changement de centre de gravité, de soi au Fils Bien-Aimé, de Narcisse à Jésus. Etre des serviteurs du Dieu vivant, de tous et de tout le créé, et de vivantes icônes de l’unique Serviteur, Jésus, s’offrant au Père, voilà ce que nous rappelle la profession solennelle que vous allez prononcer dans quelques instants par la force de l’Esprit Saint.
« C’est notre boussole lorsque les vents des tentations ou du découragement de toutes sortes se lèvent. C’est notre force lorsque l’avenir semble incertain. C’est notre humilité lorsque nous avons à reconnaître le mal que nous avons commis. »
Les événements, les contradictions, la vie quotidienne, la vie en fraternité, et même notre péché humblement confessé, nous font progressivement entrer dans l’obéissance parfaite, celle qui configure au Christ en croix, celle qui ne piétine pas notre liberté, mais l’approfondit et la fortifie, celle qui donne sens à notre chasteté dans le célibat consacré dans le respect des autres et de nos engagements, celle qui autorise que nous ne gardions rien en propre pour recevoir et partager ce que nous sommes et ce que nous avons.
« Frères mineurs, la grâce d’un nom¹ », disait l’un d’entre nous. C’est notre boussole lorsque les vents des tentations ou du découragement de toutes sortes se lèvent. C’est notre force lorsque l’avenir semble incertain. C’est notre humilité lorsque nous avons à reconnaître le mal que nous avons commis. C’est notre chemin pour témoigner que l’Evangile est une Bonne Nouvelle.
Que la Vierge Marie, Mère de Dieu, Mère de l’Eglise, Mère de miséricorde, soit l’étoile de votre route. Amen.
– Frère Eric Bidot, ofm cap.
1. Frère André Ménard, article publié dans La spiritualité de François d’Assise, Editions franciscaines, 1991, p.196-206.